Sabine Huppert est auteure de plusieurs publications en Allemagne et réceptionniste au Camping de l’Océan depuis de nombreuses années. Dans son dernier livre elle partage ses réflexions autour du Planète Camping.
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En 2018, tu as publié un livre « Planète Camping », inspiré par ton travail à la réception de notre Camping de l’Océan. Veux-tu nous en parler un peu ?
J’ai déjà écrit plusieurs livres, sortis en Allemagne. Je suis native de là bas, mais je vis depuis longtemps en France, et j’ai la double nationalité. C’est mon premier livre en français et en allemand à la fois. Le sujet m’est venu très naturellement : je prends toujours des notes, j’observe, je réfléchis … Et avec mon travail à la réception, j’avais de la matière, immense, sous mes yeux !
En quoi la vie sur un Camping te semblait particulièrement intéressant à traiter ?
Un Camping comme celui-ci présente une formidable mixité sociale. C’est un Camping qui appartient à la Mairie, ses tarifs restent plutôt accessibles. Il y a aussi des groupes d’enfants, qui viennent à travers des organismes mandatés à s’occuper de la jeunesse, notamment d’une jeunesse souvent privée de vacances.
Et à la fois, le Camping attire un public aisé. Ces gens-là pourraient facilement s’offrir des vacances plus luxueuses, mais ce qu’ils cherchent n’a pour eux pas de prix : la pureté d’une nature intacte, le cadre presque sauvage, la simplicité.
Il y a aussi une mixité de nationalités …
Oui, les gens viennent de tout l’Europe. Les côtes françaises d’Atlantique sont appréciés, notamment par les Allemands, Hollandais, Anglais ; mais les Scandinaves, Italiens ou des habitants des pays de l’Est y viennent aussi.
Effectivement, il y a beaucoup de facteurs qui se mélangent !
Oui, c’était probablement mon point de départ. Sur un même espace, on trouve presque une forme d’échantillon européen ! Et, en général, un mélange de gens qui, dans la vie normale, se ne seraient peut-être jamais croisé de cette manière.
Que veux-tu dire par « cette manière » ?
Le Camping est une sorte de mini-village, mais avec un degrés de proximité et d’interaction plus fort. Les gens se croisent – et se voient – tous les temps, dans les espaces sanitaires, en train de faire la cuisine, à se débattre avec son installation de tente … c’est un vrai partage de la vie de tous les jours. Les enfants se baladent librement sur leurs vélos dans l’enceinte du Camping (grand de 9ha, quand même) et font connaissance les uns avec les autres ; il y a un terrain de volleyball ou les groupes de jeu se forment spontanément …
On ressent un regard plutôt bienveillante de ta part .. ?
Oui, mais cela, je l’ai constaté après. Il faut dire, c’est un cadre privilégié pour voir plutôt les bons côtés des gens : on est en vacances, entourés d’une nature magnifique, on revient un peu à l’essentiel… Mais, en général, j’aime les humains, leur diversité. J’aime voir les très petits détails qui font notre particularité.
On sent parfois une pointe d’ironie
Tout à fait ! Notre condition humaine me semble souvent portée d’absurde, j’ai beaucoup de tendresse pour ça.
Comment as-tu trouvé les différents sujets ?
Oh, il y en a tellement !! J’avais juste à me pencher et ramasser … J’avais fait une première édition, en 2017, qui a très bien marché ; du coup j’ai publié un 2e tirage, élargi de 6 chapitres … et encore, je me suis arrêté !
Ce sont donc des histoires qui se sont passées sur le lieu …
Oui, mais c’est plus que ça. Je ne voulais pas écrire un bouquin rempli d’anecdotes, même si parfois elles sont très marrantes ou particulières. Le Camping est une forme de condensée de nos sociétés. Que l’ont-ils en commun les couples âgés et les très jeunes couples ? Pourquoi tant de gens portent des tatouages ? Pourquoi les gens se mettent à nu à la plage ? Comment gèrent-ils leurs enfants ? Comment s’exprime un allemand mécontent et comment se comporte un français dans la même situation ? Pourquoi tout le monde est accro’ au surf … etc. etc. Je suis quelqu’un qui s’interroge tous les temps, et il n’y a pas d’hiérarchie entre les sujets pour moi, tout peut être important, édifiant. Ainsi je tire parfois des liens vers des penseurs, comme Hannah Arendt, Rousseau ou Spinoza ….
Parle-moi d’un événement …
Par exemple, il y a eu ce très gros orage, spectaculaire, avec des trombes d’eau et une grosse branche d’arbre tombée. La panique, la solidarité, les solutions et comportements individuelles … et bien sûr cela m’a fait réfléchir sur notre relation à la nature, dont nous souhaitons qu’elle garde un aspect de carte postale.
C’est un chapitre excitant, en effet. Est-ce-que tu as, volontairement, évité certains sujets ?
Sur un Camping, tout arrive. Les drames familiales, la drague, le vol (néanmoins, vraiment très peu), et même la mort. Je n’ai pas évité des thèmes, mais je n’ai pas raconté certains évènements, plus difficiles.
Pourquoi ?
Il y avait par exemple ce père qui était violent envers son enfant, sous les yeux de tout le monde. Ou ce jeune homme qui est entré dans une psychose. Ou cette femme dont le mari s’est noyé, quelques heures après leur arrivée sur le Camping, lors de leur première ballade à la plage. Ce sont des sujets complexes, graves ; ils méritent un approche plus approfondi, je sentais que dans ce livre-là, je n’étais pas en mesure de les traiter de manière adéquat.
Je comprends. Tu veux dire un mot pour la fin ?
Je veux déjà remercier tous les gens qui ont acheté ce livre ,et qui m’ont donné leur retour ; c’était une première pour moi d’être aussi près de mes lecteurs ! Et puis pour ceux qui sont devenus curieux/ses, il est toujours disponible. Vous pouvez passer me voir à la réception pour plus de renseignements ou bien m’écrire un mail à sabine.huppert@gmail.com (Prix 10€, frais de port inclus).
Bon Camping à tous et toutes !